samedi 15 novembre 2008

La gnose ruyérienne, religion de l'âge scientifique

Le sujet que nous avons choisi évoque évidemment le titre du plus célèbre ouvrage de Ruyer, La gnose de Princeton, dont la première édition, celle que nous utiliserons, remonte à 1974. Mais il fait référence également au sous-titre du livre, auquel on ne prête peut-être pas toujours une suffisante attention : « Des savants à la recherche d’une religion ». Or, nous croyons qu’à certains égards le sous-titre est plus important que le titre, et révèle plus clairement que lui les véritables intentions de l’auteur dans son entreprise philosophique. C’est ce que nous nous proposons de montrer.

I. L’histoire d’un titre.

Chacun sait aujourd’hui que le titre : La gnose de Princeton est trompeur. Ceux qui ont connu Ruyer, qu’ils aient été ses étudiants, ses collègues ou ses amis, ou les trois, en étaient informés depuis le début. Ruyer n’avait pas caché qu’il cherchait une affabulation, susceptible de frapper le public, et d’attirer son attention sur des thèses qu’il exposait depuis fort longtemps, depuis La conscience et le corps et les Eléments de psychobiologie, et qui ont trouvé leur expression la plus accomplie, à notre avis, dans Néo-finalisme, sans obtenir de la part des scientifiques et même des philosophes, autre chose qu’un succès d’estime. L’idée lui vint d’attribuer les idées qui étaient les siennes à un groupe mystérieux de savants américains, dont il ne serait en quelque sorte que le scribe, persuadé qu’ainsi ses propres thèses apparaîtraient beaucoup plus remarquable et seraient de fait beaucoup plus remarquées. Sur le choix du mot gnose il n’hésita guère. Ses connaissances, en la matière, n’étaient pas très étendues, et d’ailleurs Ruyer, dont le savoir, en matière scientifique, était considérable, ne s’intéressait guère à l’érudition historique. Il connaissait évidemment l’ouvrage classique de Leisegang ; il se fondait aussi sur les informations que lui apportait, au hasard des lectures, une curiosité vraiment universelle. Au demeurant, le terme de gnose n’est pas pris par lui en un sens historique bien précis – dans la mesure où un tel sens existe ; il l’emploie au sens large d’une connaissance relativement réservée ou secrète dont la possession transforme ceux qui la détiennent et leur apporte un véritable salut intellectuel en les faisant accéder, autant qu’il est possible, à un ordre de réalité supra-sensible. Ruyer ne tient pas essentiellement à ce mot et prend peu de soin à le justifier : quelques lignes seulement au début du livre (1), où il signale d’ailleurs que la dénomination de gnostique est provisoire, et pourra être modifiée. L’intérêt de la notion, c’est, à la fois, son caractère vague et mystérieux, et le regain de vogue dont il jouit aujourd’hui, encore que Ruyer tienne à se démarquer fortement de tous les courants qu’on regroupe maintenant sous le terme de New Age.

A vrai dire, une étude historique plus approfondie lui aurait permis de constater que l’emploi d’un mot si controversé présentait aussi de nombreux inconvénients, dont le moindre n’est pas, précisément, le misocosmisme foncier de beaucoup de doctrines gnosticistes, ou, du moins qualifiées de telles, alors que la religion ruyerienne se définit elle-même comme une « cosmoslâtrie », et peut-être considérée, selon une expression que nous avons recueillie de la bouche même du philosophe, comme un « semi-panthéisme ». Le monde ruyérien est divin, ou encore : le divin ruyérien est cosmique ; il est, en tout cas inséparable du cosmos, sans pourtant s’identifier entièrement à lui. Il y a donc quelque paradoxe à qualifier du même nom la doctrine d’un cosmolâtre du XXe siècle et celle de Marcion ou de Basilide qui voient dans le monde crée par le démiurge l’œuvre du mal par excellence (d’où leur condamnation du Dieu biblique, du Dieu juif) et qui considèrent le séjour de l’âme dans ce monde corporel comme une punition et une déchéance. Ruyer n’ignore pas ces données très élémentaires. Il en a même traité de manière assez étendue, quoique historiquement allusive, dans un chapitre de Dieu des religions, Dieu de la science, chapitre intitulé : « Naturalisme et dualisme gnostique », dont la conclusion est que la « descente créatrice, si c’en est une, est dépourvue de toutes les harmoniques pessimistes de la chute gnostique » (3). Pourtant, dans La gnose de Princeton, il ne signale nulle part, semble-t-il, l’opposition entre la cosmolâtrie des néo-gnostiques et le misocosmisme de l’ancien gnosticisme, ce qui, en fin de compte, ne laisse pas d’apparaître quelque peu surprenant. Une savante historienne du gnosticisme, Simone Pétrement, l’a bien souligné : « La nouvelle gnose » qui, selon Ruyer, se développerait chez certains savants de Princeton, paraît bien être (…) le contraire même du gnosticisme. La religion de ces savants paraît la religion cosmique, la foi en un esprit immanent au monde, à peu près ce qu’était dans l’Antiquité la religion stoïcienne. C’est pourquoi ils ne font aucune place au Christ dans leur croyance. Le Dieu dont ils admettent l’existence est un Dieu connu directement, se manifestant directement dans les faits du monde. Le gnosticisme, au contraire, loin de n’être pas chrétien, pourrait être regardé comme une doctrine absolument centrée sur le Christ, en ce sens qu’il est la doctrine selon laquelle Dieu ne peut être connu qu’à travers un Sauveur ou un Médiateur qui a la forme humaine » (4). Assurément, Simone Pétrement mésinterprète en partie la pensée ruyérienne en la réduisant à une religion invisible et dépourvu de « nature ». Mais sa réaction manifeste l’embarras du spécialiste devant un certain usage du mot gnose.

Cependant l’usage ruyérien n’est dépourvu ni de raison ni de fondement historique. Quant à la raison qui pousse Ruyer à employer ce terme pour désigner la doctrine qu’il attribue aux savants américains, c’est, pensons-nous, que la gnose se situe à l’interface de la philosophie et de la religion. Et ce faisant, Ruyer se réfère bien à une tradition historique, quoique relativement récente, puisqu’on la fait remonter à la Renaissance, époque à laquelle on commence d’utiliser le terme de gnose pour désigner des courants, plus ou moins ésotériques, qui se prétendent détenteurs d’une connaissance véritable et universelle, portant sur les ultimes principes de la réalité, comme la métaphysique, mais procurant à ceux qui la possèdent, à la différence de la science simplement profane, ou positiviste, une sorte de salut, comme la religion (5). C’est un sens qu’on retrouve dans la tradition philosophique allemande, en particulier chez Hegel, pour caractériser l’œuvre de Boehme ou celle de Franz von Baader lequel d’ailleurs, se considérait lui-même comme un gnostique chrétien (6). Cela dit, nous n’oublions évidemment pas les raisons plus immédiates qu’avait Ruyer pour user d’un terme un peu mystérieux, au sens vague, au relent encore sulfureux, toutes caractéristiques propres à piquer la curiosité du public, à rendre incertaines, voire impossibles, les tentatives d’identification ou de vérification, en même temps qu’à différencier nettement cette religion d’un christianisme que Ruyer rejetait (7).


Quant à la localisation géographique de cette gnose à Princeton, il faut bien avouer qu’elle n’est due cette fois qu’à des raisons publicitaires : Ruyer avait d’ailleurs hésité entre Pasadena et Princeton, n’ayant pas plus de rapport avec les savants de la première Université qu’avec ceux de la seconde. Mais la considération qu’Einstein avait enseigné à Princeton l’emporta finalement sur tout le reste.

II. La nature du projet ruyérien

Tels sont les faits. On aurait tort cependant de n’y voir qu’une ingénieuse machination destinée à simplement à assurer le succès d’un ouvrage. Nous estimons au contraire qu’il faut prendre cette « mystification littéraire » très au sérieux et qu’il convient d’en appronfondir la signification. Assurément, Raymond Ruyer n’était pas dépourvu du sens de l’humour et n’avait certes pas oublié la tradition du « canular », tradition à laquelle l’avait initié son séjour à l’Ecole Normale Supérieure. Et l’idée de mystifier l’intelligentsia occidentale, si vaniteuse et finalement si crédule devant les idoles du moment, ne pouvait que lui sourire. Mais Ruyer était aussi un esprit parfaitement sérieux, et cette « mystification » ne nous paraît nullement gratuite. Elle correspond même, pensons-nous, à une véritable nécessité, si du moins on prend en compte les intentions réelles du philosophe.

Et d’abord, un point est hors de contestation : Ruyer attachait la plus grande importance aux thèses qu’il expose dans ce livre. Elles sont pour lui l’expression de la vérité pure et simple, et d’une vérité dont il estimait qu’elle se fonde sur les exigences rationnelles les plus certaines. Ce point est fondamental. Les vues qu’expose le philosophe, si surprenantes soient-elles ne dérivent nullement d’une illumination mystique ou d’une révélation transcendante dont Ruyer rejette toute possibilité : pour lui, elles découlent logiquement de la science la plus récente et s’imposent avec l’évidence de ce que lui-même a nommé un anti-paradoxe (8).

S’il est permis, en effet, de parler d’une méthodologie ruyérienne, on pourrait la faire consister presque entièrement dans la mise au jour des antiparadoxes cachés de nos opérations cognitives et dans la soumission à leur irréfutable vérité. Au cours de l’une des dernières conversations que nous avons eues avec lui, c’était en novembre 1983, il avait parlé d’un nouveau livre qu’il venait d’écrire, intitulé L’embryogenèse du monde et le Dieu invisible, avec lequel, disait-il « j’ai fait un pas de plus ». « Mais, ajoutait-il, je désespère de faire admettre mon point de vue à la science actuelle. J’aurais voulu faire comprendre une seule chose : ce que c’est qu’un domaine de survol, un champ de conscience, je n’y suis pas arrivé, j’en prends mon parti. Les scientifiques positivistes sont des idiots, le matérialisme génétique est une ineptie. Mais je suis résigné, ils ne peuvent pas comprendre ».

La nécessité dont nous parlons pourrait être caractérisée non comme une mystification, mais comme la mythification requise par toute instauration d’une religion quelconque, ou, sinon d’une religion, du moins d’un courant religieux. Nous en venons ainsi au cour de notre propos.

Sans doute notre thèse paraîtra-t-elle extravagante, exorbitante, disproportionnée, incongrue. On imagine difficilement qu’un professeur d’université, philosophe, adversaire de toute idée de révélation transcendante, réfractaire à tout pathétique religieux (« je suis, nous avait-il dit un jour, un animal théorétique »), sceptique résolu, épris de culture scientifique, passionné de technologie (il attachait beaucoup d’importance à l’histoire des techniques), puisse être considéré sérieusement comme désireux d’instaurer une nouvelle religion. Et, assurément, rien n’est plus éloigné de la démarche ruyérienne que celle du prophète juif ou du mystique, toutes attitudes dont, à tort ou à raison, il avait autant horreur que de l’existentialisme sartrien. Et s’il s’agit de fonder une Eglise, avec un culte et des rites propres à susciter une ambiance plus ou moins sacrée, avec une hierarchie, des dogmes, un calendrier, voire des excommunications, en effet on ne saurait parler de Ruyer fondateur d’une nouvelle religion. Ce serait ridicule.

Mais il faut s’entendre : si Ruyer n’a aucune l’intention, en effet, de fonder une religion nouvelle, il a cependant le ferme propos d’amener son lecteur à prendre conscience de la dimension religieuse, ou quasi religieuse, inhérente à la connaissance scientifique, lorsque celle-ci, identifiée à la philosophie, découvre enfin l’endroit du réel qu’elle ne voyait jusque là qu’à l’envers. Et c’est pourquoi cette « religion » à la recherche de laquelle sont les savants est bien une véritable gnose, en l’un des sens reconnus de ce terme.

III. Synthèse comtienne et synthèse ruyérienne.

L’entreprise ruyérienne, on le voit, est très différente de celle d’Auguste Comte fondant la religion de l’humanité, bien que les deux entreprises comportent un point de départ identique, qui est la prise en compte de la science. Mais, cela dit, tout les oppose et l’on serait même en droit de se demander si Ruyer, à quelques égards, ne s’est pas voulu comme l’anti-Comte par excellence (9). De la religion Auguste Comte retient tout, sauf le noyau proprement théologique. Au contraire, de la religion, Ruyer ne garde presque rien, sauf ce noyau théologique, qu’il conviendrait peut-être mieux encore de nommer théosophique. Assurément, Auguste Comte rejette le terme d’athéisme : « Cette qualification, écrit-il à Stuart Mill, ne nous convient à nous autres qu’en remontant strictement à l’étymologie (…) nous n’avons rien de commun avec ceux qu’on appelle ainsi que de ne pas croire en Dieu, sans d’ailleurs partager en aucune manière leurs vaine rêveries métaphysiques sur l’origine du monde et de l’homme » (10). En fin de compte, il s’agit pour lui d’opérer, par l’étude de l’histoire des sciences convenablement systématisée, une « réforme de l’entendement », la naissance d’un esprit vraiment positif dans laquelle la question de Dieu n’aura plus aucune signification et n’aura plus à être discutée (11). Autrement dit, ce qu’Auguste Comte retient de la science, c’est essentiellement la forme méthodologique de sa démarche historique et son efficacité éducative pour l’esprit humain.

Au contraire, ce que Raymond Ruyer retient de la science, c’est son contenu, et, particulièrement dans La gnose de Princeton, le contenu de la science physique, ce qui est assez nouveau. Jusque là, Ruyer s’était occupé de biologie, science dans laquelle, il convient de le souligner, il possédait des connaissances très étendues, plus étendues qu’en physique, comme lui-même le reconnaissait volontiers. Paradoxalement pourtant, c’est précisément la science physique qu’Auguste Comte regardait comme la plus contraire à la théologie (12), qui selon Ruyer, doit conduire à une théologisation de la connaissance scientifique et qui lui fourni l’occasion pour expose « sa » religion. Au fond, ce que se propose Ruyer, d’une certaine manière, c’est de « renverser » la loi des états. Alors que pour Comte, la considération de la marche de la science éduque l’esprit humain et le conduit nécessairement du théologique au positif, en passant par le métaphysique, pour Ruyer la considération de la cosmologie einsteinienne, comme de la physique quantique, conduit nécessairement l’esprit humain de l’état positif, où l’on enregistre la ponctualité des phénomènes dans l’ici-maintenant et selon le « de proche en proche », à l’état théologique où le monde tout entier envisagé dans l’unité thématique du continuum spatio-temporel, en réalité, c’est-à-dire si nous voulons bien de l’envisager comme vraiment réel, est la dimension visible de Dieu, le cerveau cosmique dont Dieu est la pensée : « Dieu est l’Esprit remis à sa place, fondamentale et primaire, malgré les apparences « émergentistes » qui trompent les cosmogonies superficielles. L’Esprit se fait clavier matériel, avant de jouer, sur lui-même devenu clavier, ses mélodies. Dieu est la Pensée dont le monde constitué est le cerveau » (13). Ici, comme chez Auguste Comte, la science joue le rôle d’un facteur décisif de conversion, mais de sens inverse. Au trois états successifs du comtisme répondent les trois instances majeures de la pensée ruyérienne : la science, la philosophie, la religion, trois instances qui, fondamentalement recouvrent la même réalité. Cette identité, a vrai dire, n’apparaît dans son effectivité pleinement pratique qu’avec La gnose de Princeton. Avant la publication de ce livre, Ruyer a surtout affirmé, et de la manière la plus forte, la non-séparation de la science et de la philosophie : « Il s’agit, dit-il, dans le seul texte important où il présente formellement sa propre pensée, de collaborer au progrès de la connaissance en travaillant à une Philosophie-Science indivise, capable de se critiquer et de se généraliser elle-même – avec ou sans « spécialiste des généralités » – à mesure que le réel se révèle dans son inépuisable subtilité » (14). Sans doute le théologien est-il souvent convoqué, dans les œuvres antérieures à la gnose de Princeton. Et Dieu est présent dans tous ses livres, depuis au moins La conscience et le corps, et les Eléments de psychobiologie. Plusieurs des livres ultérieurs (Genèse des formes vivantes ; Néo-Finalisme ; Dieu des religions, Dieu de la Science) représentent d’ailleurs en fait divers extraits d’un immense ouvrage sur Dieu que sa grosseur même rendait peu publiable et dont Ruyer n’a donné que les parties les importantes ; la dernière publiée, en 1970, Dieu des religions, Dieu de la science, est même restée pendant près de vingt ans à l’état de manuscrit.

Or, il est intéressant de procéder à une comparaison, si brève soit elle, entre ce dernier ouvrage et La gnose de Princeton, paru quatre ans plus tard. Le titre même de Dieu des religions, Dieu de la science, annonce sinon une opposition, du moins une distinction entre les deux domaines. Le point de vue de l’ouvrage est celui d’une démarche spéculative. Ruyer décrit ce qui pour lui constitue la théologie véritable des diverses religions, lesquelles sont au fond des modes d’expression mythiques d’une prise de conscience de la Nature naturans, et, par de là, de la totalité englobante supra-naturelle, sens ultime de tous les activités thématiques qui informent et constituent la Natura naturata. Il montre ainsi comment religion et science se rejoignent, mais à condition que l’une et l’autre soient réinterprétées dans la perspective de la philosophie ruyérienne, c’est-à-dire que la religion soit débarrassée des absurdités philosophiques du matérialisme mécaniciste et de son athéisme dogmatique.

On trouve alors énoncé dans cet ouvrage le renversement nécessaire, du principe comtien de la loi des trois états, états qui, chez Ruyer, sont d’ailleurs posés comme trois instances permanentes et qu’il nomme : science, philosophie et religion. La religion, en effet, dit Ruyer, est d’«essence philosophique, à tous les niveaux, en ce sens qu’elle concerne le rapport de l’homme et de l’univers total ». Une fois cette essence philosophique bien dégagée, le rapport avec la vision scientifique apparaît dans sa vérité : « Si différente qu’elle soit de la vision scientifique, la vision religieuse du monde lui reste apparentée en profondeur en ce qu’elle est « théorique » d’intention. On peut dire en certain sens de la religion ce que l’on disait autrefois de la philosophie : « elle est le savoir totalement unifié » (15). Nul doute qu’à quelques égards la démarche ruyérienne ne vise à restaurer une telle conception de la philosophie. Elle ne prétend cependant pas confondre les instances, mais préciser comment il est possible de passer de l’une à l’autre parce qu’elles recouvrent toutes trois une même et unique réalité. Evoquant la rencontre de Jung et de Mircea Eliade dans l’usage commun du mot « archétype », Ruyer conclut : « On passe là encore du monde naturel – spatial et transpatial – au monde religieux, par totalisation. Le monde de la religion est total dans toutes les dimensions, physiques et métaphysiques. Il suffit que les archétypes du comportement humain soient eux-mêmes saisis sur fond d’un Archétype total, pour que l’on soit dans la sphère religieuse et que la méta-physique devienne théologie » (16) .

Qu’y a-t-il donc de plus, ou qu’y a-t-il d’autre dans La gnose de Princeton ? Quant au contenu des thèses ruyériennes, peu de choses. Le fond de la doctrine est identique et bien des analyses sont semblables. Cependant, deux points peuvent être soulignés. D’une part, plus que dans aucun autre de ses livres, Ruyer y traite des problèmes de la physique contemporaine et donc aborde directement des questions qu’il n’avait jusqu’ici traitées qu’occasionnellement. D’autre part, il se propose dans La gnose de Princeton, non plus de décrire la religion, en général, à partir des données que fournit l’histoire des religions, l’étude des religions comparées, la psychologie et la psychanalyse de l’homo religiosus, fût-ce pour élaborer sa propre conception de l’essence de la religion, mais bien de proposer lui-même une sorte de nouvelle religion, effectivement pratiquée, dont les dogmes, où plutôt les articles de foi fondamentaux seront fournis par les données de la physique contemporaine. Ruyer est passé ici du stade de spectateur, ou d’observateur philosophe, à celui d’acteur. La différence, à certains égards, est considérable.

IV. Du dieu de la vie au Dieu du cosmos.

Pourquoi fallait-il qu’il abordât de front l’étude de la physique pour oser en quelque sorte « franchir le pas » ? La réponse ne fait aucun doute, et elle est double. En premier lieu, la science physique porte sur une couche plus profonde, plus cosmologiquement décisive, de la réalité naturelle : certes, les phénomènes biologiques, surtout embryologique, imposent fortement l’idée d’une activité informante et finalisée selon des thèmes spécifiques et quasi-archétypaux ; toutefois, ces thèmes paraissent eux-mêmes travailler et organiser une matière inerte, plus primitive et plus déterminante que le biologique, laquelle matière en outre, dans ses constituants atomiques et subatomiques, renvoie nécessairement à une cosmologie générale, à une conception totalisante de l’espace-temps. La biologie, et plus encore la psychologie qui en est inséparable, fournissent des modèles explicatifs pour penser le réel en activité de réalisation, modèles dont le plus caractéristique demeure celui de la conscience, ou du champ de conscience. Mais c’est la physique qui pose les questions les plus radicales en ce qui concerne le monde envisagé dans sa subsistance propre et sa nature d’univers, c’est-à-dire dans sa réalité de totalisation englobante. Jacques Merleau-Ponty que Ruyer lisait beaucoup et quelques autres ont montré non seulement l’émergence, avec Einstein et la physique contemporaine, d’une nouvelle cosmologie, mais surtout la renaissance de la cosmologie en tant que telle, laquelle avait disparu avec l’instauration de la physique galiléenne : pour une physique mécaniciste, en effet le monde est un pur contenant spatio-temporel indéfini, sans forme, sans propriété et sans rapport physique avec aucun des phénomènes qui s’y produit.

En second lieu, les physiciens eux-mêmes, beaucoup plus que les biologistes, se comportent en métaphysiciens et n’hésitent pas, lorsqu’il s’agit de physique fondamentale, à s’engager dans des affirmations philosophiques fortes. Combien de fois n’avons-nous pas entendu Ruyer protester contre le mécanicisme strict d’un Monod prétendant réduire tous les phénomènes vivants au fonctionnement de structures moléculaires, et regretter qu’il ne se transforme pas en physicien : « Pourquoi en reste-t-il au niveau moléculaire, demandait-il, et pourquoi ne descend-il pas au niveau atomique et sub-atomique ? Il verrait alors que ces structures moléculaires ne constituent nullement des systèmes matériels stables, comme les pièces d’un mécanisme d’horlogerie, mais que l’unité de leur subsistance spécifique est de nature énergétique, et finalement sémantique » (17). Ainsi de nombreux physiciens américains, anglais, allemands ou même français, s’essayaient à élaborer une vision du cosmos qui ne fût point matérialiste, qui rompît délibérément avec le déterminisme mécaniciste vicinal et qui, par exemple chez Heisenberg ou Schrödinger, pouvait même aller jusqu’à un certain idéalisme subjectiviste. Leurs démarches autorisaient en quelque sorte Ruyer à conduire ses propres thèses jusqu’à leur terme, en même temps qu’elles lui donnaient occasion de rectifier les « naïvetés » philosophiques des physiciens, lesquels demeuraient encore prisonniers de leur anti-matérialisme.

Enfin, en troisième lieu, même si Ruyer rejettait l’idéalisme subjectiviste d’un Schrödinger, au nom de ce que lui-même nomma un jour devant nous « un idéalisme objectif » (18), il retenait de cette interprétation le fait scientifique qui lui avait donné naissance, et qui était à la base de la nouvelle cosmologie : l’impossibilité de séparer le spectateur du spectacle, le sujet de l’objet, l’observation du réel physique de la réalité observée. L’observation elle-même doit être regardée comme une possibilité effectivement comprise dans le cosmos, elle est un événement du cosmos lui-même inclus dans sa possibilité générale, et non pas l’effet d’un observatoire en position extra-cosmique. Bref, l’observation est en réalité une participation.

Nous touchons ici au point fondamental. C’est par la conversion de l’observation (envers illusoire) en participation (endroit réel) que la connaissance scientifique commence à se transformer en gnose et à révéler sa nature fondamentalement religieuse.

Expliquant l’expression de « cosmologie » basique par laquelle la gnose ruyérienne définit son entreprise, Ruyer déclare : « Il ne s’agit pas d’établir une sorte de cosmologie (ou de philosophie religieuse minimale. Il s’agit encore moins d’une « science religieuse » ou d’une « religion scientifique ». Ce qu’entendent les gnostiques, c’est ceci : une cosmologie, étant totalisante pour l’espace et le temps, doit totaliser les observateurs comme les observés, les points de vue comme les points vus, les « ego » comme les « ici-maintenant » (19).

La participation cosmique, ou le cosmos comme participable par et pour les consciences humaines, conduit alors à la sagesse gnostique, donc à l’accomplissement définitif de la gnose, sous la forme de ce que Ruyer appelle la « psychosynthèse », par opposition à la psychanalyse.

V. La participation sémantique, clef de la gnose ruyérienne.

Ruyer avait déjà développé la notion de connaissance et d’information par participation dans un article important intitulé « Les observables et les participables ». Il reprend cette doctrine dans La gnose de Princeton (20). Elle nous paraît être la clef de cette gnose cosmologiste qui fait le fond de sa pensée. Connaître, ce n’est pas seulement poser un objet devant soi, bien que ce soit là le seul mode de connaissance reconnu par la science. Plus réellement, plus fondamentalement, c’est être informé, c’est-à-dire recevoir en soi une forme, un sens, qui fait sens en nous et donc auquel nous participons. Si la connaissance était pure observation extérieure, elle serait connaissance de rien, d’une pure succession de ponctualités événementielles incohérentes. Saisir un sens, une forme, c’est nécessairement être saisi, être psychiquement et sémantiquement modulé et informé par ce qu’on saisit. On peut ainsi passer de la participation cognitive à la participation psycho-biologique et même à la participation cosmologique, puisqu’il n’y a pas de différences essentielles entre elles. Participer, ce n’est donc pas seulement connaître par information, c’est aussi exister. Tout être individuel réel, c’est-à-dire qui s’auto-survole et se possède lui-même (un atome, une molécule, une bactérie, un arbre, etc.) et qui n’est pas un être-amas, sans unité domaniale (une motte de terre, un nuage), tout être réel n’existe qu’en participant aux thèmes spécifiques qui définissent son identité temporelle, les normes de son activité, la nature de ses instincts formatifs, de même
que le sujet parlant ne découvre la parole qu’à la condition de participer à la langue qui parle en lui. C’est sur la base de cette participation et de ses divers modes, que l’être explore et découvre en quelque sorte les exigences de sa nature, qu’il fait l’expérience de la culture, du monde et même du sur-monde et de la Volonté de la Norme suprême de la Conscience universelle. Ici la participation gnostique accède vraiment à sa dimension religieuse. « Dans toutes les religions, écrit Ruyer, Dieu est un Participable plutôt qu’un Observable. C’est donc un inconnaissable au sens ordinaire. Toutes les expériences religieuses traditionnelles sont, en un sens, des expériences psychologiques, transposées mythiquement (…). Mais on peut aussi – c’est toute la Nouvelle Gnose – considérer que l’expérience psychologique, biologique, et linguistique de la participation est bien une sorte de révélation naturelle, à valeur religieuse » (21). Et Ruyer conclut sur cette déclaration tout à fait significative : « La gnose consiste à vouloir faire entrer les participables et la participation dans la science comme dans la philosophie religieuse par la grande porte, non par la petite porte d’une psychologie suspecte, à peine scientifique, et vaguement occultiste, mais par la grande porte de la micorphysique, de la biologie du développement, de la psychologie compréhensive, de la linguistique non pavlonienne, celle de B.L. Whorf ou de N. Chomsky. Elle consiste à montrer que la science révèle la participation, mais en la voyant seulement par son envers. » (22).

On voit mieux maintenant l’ampleur de l’entreprise ruyerienne : elle est extrêmement ambitieuse, et, d’une certaine manière, on peut même la juger exorbitante : non seulement Ruyer entend embrasser dans une même vision unitaire tous les domaines de la pensée humaine : physique, biologie, psychologie, philosophie, religion, sagesse – et l’on peut estimer qu’il y est effectivement parvenu – mais encore il ne se propose ni plus ni moins que d’ouvrir une nouvelle perspective religieuse, une nouvelle voie vers le divin, une nouvelle gnose, mais une religion, une théologie et une sagesse qui soient scientifiquement « crédibles », et donc philosphiquement possibles. Cette dimension tout à fait extraordinaire de l'entreprise ruyérienne a été souvent méconnue pour plusieurs raisons : ceux qui ont cru à l'existence des gnostiques princetoniens attribuaient l’instauration de cette « nouvelle religion » aux savants américains (dont Ruyer n’était que le secrétaire) ; ceux qui étaient au courant de l’affabulation n’y voyaient qu’un subterfuge amusant pour attirer l’attention du lecteur sur des thèmes maintes fois exposés par Ruyer. Tout cela est d’ailleurs incontestable à quelques égards. L’affabulation repose sur un fond de vérité auquel, par un effet inducteur, elle a précisément fini par donner forme : de grands physiciens souscrivent à bien des thèses de Ruyer et s’y sont sans doute reconnus ; et, d’autre part, cette affabulation a suscité dans le monde entier un intérêt considérable pour la pensée du philosophe : le but visé a été atteint. Mais, si l’on prend cette pensée vraiment au sérieux, on est obligé d’aller plus loin. Cette affabulation n’était pas seulement possible et souhaitable, elle était aussi nécessaire, et nécessaire à la fois négativement et positivement. Négativement afin de prévenir et de rectifier la tentation très fréquente chez beaucoup de savants de se référer à des religions orientales et à des courants mystiques plus ou moins bien compris ou surestimés, en leur offrant une religion beaucoup plus rationnelle et scientifiquement plausible ; au fond Ruyer dit aux savants : inutile d’aller chercher une religion en Orient, il suffit de regarder la science à l’endroit. Nécessité positive maintenant, afin d’éveiller son lecteur à la conscience de la vraie nature de la participation. Qu’est-ce que la gnose, en effet, sinon la conscience de la participation ? Et qu’est-ce que la participation à Dieu ? Tels sont les points que vous voudrions rappeler pour terminer.


VI. L’initiation éleusienne.

Quant à l’intention de Ruyer d’élaborer une « religion basique », c’est-à-dire d’amener son lecteur à prendre conscience de la nature intrinsèquement religieuse de notre vision foncière du réel quand elle est remise à l’endroit, lui-même nous l’explique très clairement : il ne s’agit pas de fabriquer de toutes pièces une nouvelle religion, mais de créer les conditions propres à l’éclosion, chez nos contemporains, d’une conscience gnostique (23). Que la nouvelle religion repose sur une théologie « crédible », rationnellement « acceptable », il l’affirme expressément à plusieurs reprises (24). Enfin que la participation soit, en son fond, participation au divin, c’est là le principe majeur de toute sa métaphysique. De même que l’univers, en tant qu’il est perpétuellement en train de se faire et de réaliser les thèmes transpatiaux et transtemporels qui spécifient sa nature, est Dieu visible, ce que nous pouvons voir de Dieu, de même l’intelligence, en tant qu’elle cherche à saisir un sens, c’est-à-dire à participer sémantiquement à l’information divine, pense en définitive, « à partir de Dieu », comme Ruyer lui-même nous l’a dit un jour, c’est-à-dire est pensée par Dieu, le Sens des sens, dans son acte même. Dès lors, que doit faire le gnostique ruyérien ? Ou plutôt, que ne peut-il pas ne pas faire ? C’est ici que nous touchons au point le plus fondamental de la nécessité de la mythification ruyérienne, car c’est celui où le contenu de la gnose ruyérienne entend justifier, en la fondant, la forme mythique dans laquelle elle s’est exprimée. Et en effet, dès lors que le gnostique ruyérien n’est pas un théorétique observateur, mais un théorétique participateur, la tâche intellectuelle qui lui incombe ne saurait être de proposer des théorèmes dogmatiques à croire, mais des thèmes sémantiques à rechercher et à deviner. Puisque Dieu est, à quelques égards, la « langue maternelle » universelle, constituante de la nature et de l’ordre des choses, tout ce que peut faire le gnostique, c’est tenter d’apprendre à parler cette langue. Dieu ne dit rien mais Il parle dans toute intelligence qui s’efforce d’épeler l’univers. « Dieu, dit Ruyer, n’est pas un Patron, ou un Parleur soupçonnable, mais une Langue maternelle ou primordiale, en-deçà de toutes les langues, et (qu’)il n’est pas un être mythique, justement parce qu’il fonde tous les mythoï. Dieu est le Participable universel (…) Langue qui se fait parler, non par imitation, mais par invention participante » (25).

Dès lors que Dieu fonde tous les mythoï, il fonde aussi le mythos ruyérien de la gnose princetonienne. Qu’est-ce en effet que la mythique gnose de Princeton sinon une tentative d’exploration en vue d’une participation sémantique ? La question de la vérité ou de la fausseté de la fable imaginée par Ruyer n’a pas plus à se poser que celle de la vérité de tel organe prédateur ou capteur, inventé par la nature, ou de tel mythe religieux inventé par la culture. La gnose de Princeton est un organe non biologique, mais philosophique, destiné à permettre une exploration et un captage de la sémantique divine universelle, ce qui, d’une certaine manière, est vrai de tous les ouvrages de la métaphysique, mais qui, ici, est explicitement affirmé. Car la gnose de la participation ne peut s’enseigner à la manière, antignostique, d’une description objective et selon la logique de l’observable. L’enseignement de la gnose ne peut s’enseigner que d’une manière gnostique, c’est-à-dire par participation, et par participation au jeu même de la gnose ; ce qui signifie qu’il s’agit au fond d’une initiation. Et non seulement le livre tout entier de La gnose de Princeton est un jeu, celui d’une mythique gnose scientifique, jeu auquel Ruyer propose à son lecteur de jouer, en lui donnant à croire et à rêver sur l’existence de ce groupe mystérieux, mais encore le livre est lui-même le jeu par lequel Ruyer tente de s’initier à la gnose, le dispositif mythologique qui lui permet de conduire à terme sa métaphysique et sa théologie, lesquelles impliquent en effet qu’il aille aussi loin que les religions constituées, mais selon un mode philosophique acceptable.

L’église gnostique est donc aussi réelle qu’invisible. Dans cette Eglise, nous dit Ruyer, « chacun s’initie lui-même, à son moment, réinvente la Règle, comme dans un le jeu de cartes inventé par l’un d’eux (le jeu « Eleusis »), où il faut deviner la règle, non l’appliquer avec astuce » (26). Et il conclut : « La nouvelle gnose est comme Eleusis : chacun s’initie lui-même. Chacun est tour à tour, ou à la fois, joueur et maître du jeu. Il y a une sorte de cooptation libre et mutuelle – sévère néanmoins car la règle est subtile. Les gnostiques estiment en outre que leur système d’initiation représente le système même de l’existence réelle, où chaque être doit découvrir par lui-même, en prenant l’initiative, ce qui est attendu de lui par le Maître de jeu inconnu » (27).

On ne saurait être plus clair. Et c’est pourquoi le sous-titre ne comporte pas seulement les termes de « savants » et de « religion » que nous avons essayé de commenter ; il comporte aussi le terme de « recherche » dont la signification se découvre maintenant plus nettement : la religion gnostique, en effet n’est ni fondable, ni instituable. Elle ne peut être que recherchée.

Le mythe de la gnose de Princeton, au terme de notre réflexion, apparaît donc pour ce qu’il est, c’est-à-dire comme l’un de ces « montages » grâce auquel la sagesse des néo-gnostiques cherche à comprendre ce qu’elle peut de la Sophia divine. Du moins en sera-t-on convaincu si l’on s’efforce d’interpréter ce mythe à sa propre lumière, de lire Ruyer aussi ruyériennement que possible. C’est ce que nous avons tenté de faire. Une seule question se pose alors : puisque la fonction d’un mythe ne réside pas dans sa vérité mais dans son efficacité et sa fécondité sémantique, on est en droit de se demander si la gnose de Princeton est un montage efficace ? A chacun d’en juger. Pour notre part, nous ne saurions renoncer à rechercher la vérité des théophanies qui nous font vivre.

Texte paru dans « Raymond Ruyer de la science à la théologie » sous la direction de Louis Vax et J.J. Wunenburger, éditions Kimé, en 1995.


Notes

(1) La gnose de princeton, p. 10.
(2) Ibid. p. 7.
(3) Flammarion, 1970, p. 106.
(4) Le Dieu séparé – les origines du gnosticisme, Cerf, collection « Patrimoines », 1984, p. 41-42.
(5) C’est également la thèse de M. Gex, « La gnose de Princeton. Une synthèse de la philosophie et de la religion », dans Revue de théologie et de philosophie, Lausanne, n°114, 1982, pp. 415-426.
(6) Hegel, Encyclopédie des sciences philosophiques en abrégé, Préface de la seconde édition, Gallimard, pp.63-65.
(7) Michel Tardieu, Jean-claude Dubois : Introduction à la littérature gnostique, t. I (collections retrouvées avant 1945), Cerf – C.N.R.S. ? Collection « Initiations au christianisme ancien », 1986, p. 33-34. Les savants auteurs de cet indispensable ouvrage ne voient en effet rien d’autre dans la gnose ruyérienne que l’usurpation d’un terme à des fins publicitaires, ce qui nous paraît inexact.
(8) Cf. La gnose de Princeton, p. 21-22 ; également : Néo-finalisme, pp. 1-7 ; Les cents prochains siècles, pp. 39-142 ; Les paradoxes de la conscience, passim.
(9) Ruyer a exposé son point de vue sur Comte au chapitre III de Dieu des religions, Dieu de la science : « Le domaine vital des animaux et le monde religieux de l’homme » (p.45-54).
(10) Lettres d’Auguste Comte à Stuart Mill, publiée par Lucien Levy-Brühl, Alcan, 1899, pp. 352-353 (lettre du 14 juillet 1845).
(11) Philosophie première, Cours de philosophie positive, (Leçons 1 à 45), présentation et notes par Michel Serres, François Dagognet, Allal Sinaceur, Hermann, 1975, p.26.
(12) Ibidem, p. 24 : « La théologie et la physique sont si profondément incompatibles, leurs conceptions ont un caractère si radicalement opposé… »
(13) La gnose de Princeton, p. 173. Et n’oublions pas que ce qui est ontologiquement premier, c’est la Pensée et non le cerveau : « l’Esprit se fait clavier matériel ».
(14) «Ruyer», dans : Les philosophes français d’aujourd’hui, sous la direction de D. Huisman et G. Deledalle, 1959, p. 275.
(15) Dieu des religions, p. 61 et p. 63.
(16) Ibid., p.67.
(17) «L’atome n’a besoin ni de matériel, ni de technique subordonnée. Il n’a pas de besoins organiques. Son « âme » – ses lois ondulatoires – n’est pas tombée dans un corps, pour la raison que son « corps » est formation incessante par son « âme ». L’atome n’a aucun souci de nutrition ou de reproduction. Il ne meurt pas, et il ne tue pas. Il ne laisse pas de cadavre. Les atomes de la boue ne sont ni boueux ni sales. Ils sont plutôt une sorte de musique à l’état pur » (Dieu des religions, Dieu de la science, p. 104)
(18) L’expression a été revendiquée par Schelling pour définir sa propre position relativement à l’idéalisme subjectif de Fichte et à l’idéalisme absolu de Hegel (Darstellung meines Systems der Philosophie (1801) ; Werke, IV, p. 109).
(19) La gnose de Princeton, p.24.
(20) Revue philosophique, t. CLVI, 1966, pp. 419-450. La comparaison de cet article avec les passages 127 à 130 de La gnose de Princeton montre que Ruyer a réutilisé d’importants passages de cet article (avec quelques modifications).
(21) La gnose de Princeton, p. 129.
(22) Ibid., p. 130.
(23) Ibid., p. 19
(24) Ibid., 70, p. 73, p. 130, etc.
(25) Ibid., p.139 ; c’est nous qui soulignons.
(26) Ibid., p. 12.
(27) Ibid., p. 13.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Félicitations pour votre article. La Gnose de Princeton est le livre qui m'a propulsé vers la philosophie et c'est mon livre de chevet depuis sa parution. Nous sommes en 2014 et j'ignorais tout de sa vraie genèse, dont le dévoilement ne vient d'ailleurs que renforcer mon adhésion à cette religion intelligente et nécessaire.
Albert Stuckenbruck